Dossier : Le sport et l'homosexualité, le cas Michael Sam

Michael Sam tout sourire au QG des Cowboys
Michael Sam tout sourire au QG des Cowboys
le 09/09/2014 à 20:23 par Thomas Depaepe

Dimanche 31 août, Michael Sam est “coupé” par les Rams de Saint Louis et ce qui aurait pu être une information anecdotique ne l’ait en fait pas car ce joueur qui postule à la NFL n’est pas un joueur « lambda »… en fait il l’est mais le traitement médiatique et publique de sa pratique sportive est traitée sans cesse sur un mode exceptionnelle car il est le premier joueur « ouvertement homosexuel » à tenter de devenir joueur dans la prestigieuse NFL. Et au pays de l’oncle Sam c’est une petite révolution d’imaginer que le « pré carré masculin » (car le football américain au féminin n’est « malheureusement » presque réduit qu’a sa forme « spectacle » avec la Lingerie Football Ligue, renommée depuis Legend Football League par « puritanisme ») puisse accueillir un joueur homosexuel. Érigé en porte étendard d’une communauté, Michael Sam est devenu un symbole alors même que toute équipe sportive ne devrait se poser qu’une seule question : mon équipe sera-t-elle plus performante ou pas avec lui sur le terrain ? Mais c’est un symbole qui révèle le difficile parcours d’un « gay » alors qu’il aurait dû être un athlète comme un autre.

Pour ceux qui n’ont pas particulièrement connaissance du parcours de Michael Sam, on peut résumer ainsi la situation : après une carrière universitaire du côté de l’Université du Missouri, Sam auréolé d’une sélection parmi les meilleurs joueurs universitaires a décidé de se présenter à la draft 2014 mais aussi dans la foulée de faire son coming-out dans les médias. A peine la conférence de presse terminée, que la chaine CBS revoyait son classement à la baisse de 70 places en le plaçant 160ème meilleur joueur à se présenter en NFL (alors qu’il était auparavant 90ème). Quelques mois plus tard il est repêché par les Rams de Saint-Louis à la 249ème place soit une « chute » encore plus importante qu’anticipée par CBS. Mais cette sélection, bien que tardive, est une première historique et Michael Sam touche enfin du doigt son rêve : il fête alors son premier pas en NFL en postant une photo de lui en train d’embrasser son petit ami. Mais la draft n’est que le début du processus, et malgré une pré-saison plus que correcte, l’équipe du Missouri a décidé de ne pas le garder pour la saison officielle. Dès lors depuis ce 31 août Michael Sam est au chômage et libre de signer avec l’une des 31 autres équipes… si tant est qu’elles lui fassent une offre. Et si aucune ne fait une offre, il serait difficile de ne pas crier à l’homophobie même si on ne peut non plus demander une loi de "discrimination positive" liée à la sexualité dans le sport à l’image de ce qui existe sur la « question communautaire ».

Il serait totalement délirant de jeter la pierre à la franchise des Rams pour ce « limogeage » car clairement Sam avait moins de talent que d’autres joueurs dans l’équipe (il avait d’abord été pris car c’était un joueur « local »), et même s’il a fait une très bonne pré-saison (malgré un ou deux errements sur équipe spéciale) sa place dans le roster définitif n’était pas assurée depuis le départ au vu du talent présent chez les Rams dans le Front-7 et il est presque logique que la 53ème place autorisée dans l’équipe ait été attribuée à un autre débutant qui a plus réussi son entrée dans la ligue (Ethan Westbrooks).

Mais si les Rams ont joué le jeu et une fois libéré, il était intéressant de voir ce qu’allaient faire les 31 autres franchises NFL. En effet, ces 31 équipes avaient soigneusement « évités » de sélectionner Michael Sam (alors qu’elles en avaient eu à 7 reprises chacune l’opportunité) en invoquant des éléments plus ou moins crédibles mais qui tournaient tous autour du fait qu’il n’était pas encore certain que ce joueur pourrait franchir l’étape vers le sport professionnel malgré de bonnes performances universitaires. Au regard de sa pré-saison, cet argument ne tenait plus et une dizaine d’équipes au moins ont des joueurs moins talentueux que Michael Sam dans leur effectif et donc auraient intérêt à faire un « échange ».

Quelque peu embarassés, les managers des franchises invoquaient une autre raison bien plus perverse : avoir un joueur comme Sam pourrait être une nuisance car son cas est très médiatisé (bizarrement le recrutement de Tim Tebow pourtant star « catholique autant que cathodique» n’a pas posé soucis, et cette année le très « polémique » Johnny Manziel a été retenue pour débuter la saison du côté de Cleveland). En fait tout cela cache mal le fait que les équipes ne veulent pas « prendre le risque » d’avoir un joueur homosexuel dans leur vestiaire : il faudra bien se rendre à l’évidence sport et homosexualité font « mauvais ménage » et la NFL comme les autres grandes ligues sportives voient l’homosexualité comme une « nuisance ».

Bizarrement d’autres « nuisances » sont acceptées : certains joueurs NFL ont des pédigrées criminels ou sont liée à des affaires de gang, d’autres ont subi des condamnations pour violence conjugale (et hérité de seulement 2 matchs de suspensions comme Ray Rice avant les derniers éléments de ces dernières 24 heures), d’autres enchainent les contrôles positifs aux stupéfiants, l’an dernier on a eu un scandale de harcèlement du côté des Dolphins, des joueurs ont eu à subir des procès pour viol… mais un homosexuel, « Ô grand dieu non ! » car il faut que le football reste une affaire « d’hommes » !

Après évidemment de notre côté de l’Atlantique la situation n’est pas meilleure sur la condition des homosexuels dans le sport professionnel (rappelons-nous qu’il y a quelques années Vikash Dhorasoo avait été « banni » par ses partenaires du PSG non parce qu’il était gay, mais parce qu’il avait « osé » s’afficher à la gay pride) et que lorsque Ian Thorpe a annoncé son homosexualité dernièrement on a eu une vague d’indignation chez les nageurs au titre que Thorpe avait « profité » de sa situation en regardant les autres nageurs pendant des années. On imagine bien sûr qu’après des heures d’entrainements, ou au cœur d’une compétition, Thorpe n’avait que cela à faire que de regarder le corps des autres hommes afin de jeter ses « fantasmes » sur eux.

Finalement, mercredi dernier, nous apprenions que Michael Sam avait été recruté par Jerry Jones et fera partie cette saison de l’équipe d’entrainement des Dallas Cowboys avec 9 autres joueurs. Une excellente nouvelle pour le foot US, la NFL et un bon signal envoyé par Jones. Il faut dire qu’engager un joueur homosexuel au pays des cowboys était difficilement prévisible (tout le monde n’a pas aimé le film Brokeback Mountain) même si la fin de saison prématurée de leur rookie DE Ben Gardner avait ouvert la porte.

Le très critiqué Jerry Jones a, à 72 ans, évité à la NFL d’avoir l’air de vivre un demi siècle en arrière, à une époque où un noir ne pouvait pas fouler les terrains avec des blancs.

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 On ne peut pas atteindre la perfection, mais en essayant de le faire, on peut accéder à l'excellence.  – Vince Lombardi

En VO :  Perfection is not attainable, but if we chase perfection we can catch excellence. 

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