Julien Luneau : Le Flash entre vie associative et performance
Afin de poursuivre certaines réflexions trés interessantes, soulevées par le DTN Thierry Soler et l'entraineur de l'Equipe de France Junior Olivier Moret, sur la structuration des clubs, la prise en charge des Juniors dans un parcours d'excellence et la question des pôles et des clubs performances, nous avons souhaité tendre le micro à Julien Luneau (Président du Flash) afind qu'il nous livre sa vision de la question.
L'idée n'est pas de crée la polémique, mais de poser certains débats et nous ne manquerons pas de donner d'autres visions et donc laisser chacun expliciter et expliquer son point de vue dans les semaines qui viennent.
Cette saison aura été en demi-teinte pour le Flash : champion Junior, mais défaite en finale D3 et demi-finaliste (seulement) en Elite. Quelles en sont les raisons?
Il est vrai que l’on attend toujours l’excellence de notre part et qu‘une demie finale en élite est notre moins bon résultat depuis 2004. Après deux rencontres ce week-end que nous ne méritions pas de remporter, nous allons justement creuser ces raisons et utiliser cela pour repartir d’autant mieux. Cela dit, l’objectif était clairement de reconquérir le titre junior. Quant à la D3, il s’agit d’une équipe de formation et les résultats sportifs ne sont jamais primordiaux. C’était beau pour le groupe d’atteindre ce niveau de compétition mais nous sommes évidemment déçus de ce résultat.
Pour parler des Juniors qui te tiennent à cœur, quel est ton sentiment sur la sélection de joueurs qui ont fait tout leur parcours au Flash et qui partent pour Austin?
Ils me tiennent à cœur car j’en suis issu et cela a constitué pour moi une expérience formatrice voire fondatrice.
C’est toujours une fierté de voir nos juniors participer à ce type de compétitions. Depuis 28 ans, les sections jeunes sont au cœur de notre projet associatif et on ne peut que se satisfaire lorsque leur talent individuel et notre travail collectif sont reconnus par la DTN.
Du coté des Juniors, vous avez investi dans un stage en Pologne, vous avez un coaching staff de talent... mais avez vous l'impression d'en faire assez pour permettre aux talents que vous avez de véritablement se révéler?
Nous offrons à nos jeunes une pratique quasi quotidienne, vraisemblablement le meilleur staff en France et des possibilités de vivre des expériences de vie marquantes. Ils n’ont jamais été sacrifiés sur l’autel des résultats élite de par notre politique sportive respectueuse de l’investissement de leur part pour performer. Il nous reste à travailler de mieux en mieux sur les parcours autour du projet sportif et alimenter l’envie d’association.
Votre équipe Sénior semble devoir se renouveler pas mal l'an prochain (départ au niveau de la ligne si j'ai bien compris, les américains qui partent), comment envisagez vous la prochaine saison?
La réflexion collective entre élus, staff et joueurs est entamée depuis quelques semaines concernant le groupe élite qui représente notre vitrine et nous prendrons des décisions très prochainement. Il est certain que nous devons renouveler une partie du groupe élite et les vieux grognards de la OLine méritent un repos bien mérité après une carrière aussi remplie. Nous devons apporter des changements d’ordre technique mais aussi dans l’état d’esprit et la démarche collective. Je reste persuadé que nous serons compétitifs à l’aube de la saison 2013.
Avec plusieurs Juniors qui montent en Sénior, va-t-on assister à un rajeunissement de l'équipe Élite?
Assurément, avec un groupe pétri de talents comme les J3 qui vont monter en élite, Les jeunes prendront la place qui est la leur comme nous l’avons toujours fait. A l’inverse d’autres structures, 80 % de notre groupe élite a débuté le football en noir et jaune.
N'est-il vraiment pas possible d'intégrer plus rapidement les Juniors en Élite? Pour prendre un exemple concret, comment expliquez vous que Doukouré ait été en D3 alors qu'on voit cette année sa classe en Élite?
J’ai cru comprendre que la DTN critiquait notre politique jeune consistant à attendre leur fin de cursus junior pour les intégrer en élite. Certainement pas pour collectionner les titres comme cela a été dit, même si ces derniers représentent une performance collective d’importance. Nous en sommes fiers, comme je pense chaque club qui cherche à en remporter le plus possible. Ce choix s’appuie sur un travail d’accompagnement d’un groupe sans brûler certaines étapes. De plus, le niveau de notre groupe élite ainsi que le nombre de séniors dont nous disposons au club ne nous obligent pas à déshabiller une section pour en habiller une autre comme on peut le voir ailleurs. Si la performance individuelle, est prise en compte, l’équilibre collectif et son intérêt prône sur le désir de l’athlète. Je rappelle que nous sommes des structures associatives qui ne sont pas au service de l’athlète mais qui élaborent avec ces derniers un projet humain et ancré dans une réalité territoriale. Quand Mickaêl Doukouré était en J2 en 2007, le groupe de receveurs de l’équipe composé de grands talents jouait l’Eurobowl et dominait le championnat de France. Il n’avait pas sa place. De plus, encadrer un athlète sur un stage d’une semaine et accompagner un individu au quotidien dans son projet de vie, tout en respectant des règles collectives, n’est pas la même chose.
Enfin, et sur le fond, nous revendiquons notre indépendance concernant la politique sportive portée par les élus et nous ne la définissons pas en fonction des équipes de France ou en sous-traitant notre secteur technique à la DTN comme certains. Cette politique a porté ses fruits et a apporté de nombreux athlètes en équipe nationale et en NFL Europe. Cela ne nous empêche pas de nous conformer aux directives fédérales quand cela nous paraît pertinent.
Le fait de travailler avec les jeunes dans leur milieu, par rapport au pôle où ils sont "extraits" à ce dernier, cela change la façon de travailler?
Encore une fois, nos divergences avec la DTN relève du fond. Nous ne sommes pas une salle de mise en forme qui privilégie un client qui arrive avec ses desiderati. Nous accompagnons des jeunes qui ont la volonté de performer mais qui se construisent et se structurent au sein d’un groupe. Nous travaillons certainement très différemment mais la diversité est souvent positive. Nous souhaitons juste faire entendre une autre vision comme beaucoup de clubs tels les cougars ou les molosses et bien d’autres qui font leur choix en toute autonomie et qui de ce fait enrichissent le football en France.
De quoi êtes vous le plus fier sur le long terme : des titres? de la vigueur de la vie associative du Flash? de l'impact que vous avez sur une commune "difficile"?
Je crois que l’on peut être fiers de tout cela. Les titres concrétisent des expériences humaines et collectives avec un aboutissement concret. Concernant la vie associative, elle est au cœur de notre activité et rares sont aujourd’hui les lieux où les personnes se regroupent pour un but commun sans attendre rémunération ou profit. Nous défendons l’idée d’un sport amateur de haut niveau.
Concernant les conditions difficiles de vie dans notre département, elles sont indéniables mais cela fait partie de ce que nous sommes et je ne développerai pas de misérabilisme ici.
Avec le niveau que vous avez acquis sportivement, n'est-il pas logique que vous vous inscriviez dans une démarche de labellisation "club excellence"?
Nous travaillons en effet pour nous inscrire sur cette labellisation en tant que club mais, afin de ne pas vampiriser le football dans le département et de le développer pour le plus grand nombre (comme le souhaitent les institutions locales), nous avons beaucoup travaillé pour ouvrir un centre intégrant le Parcours d’excellence sportive sur le 93, géré par le CDFA (donc tous les clubs du département). Nous avons reçu récemment une réponse négative émanant de la DTN. Nous remplissons l’ensemble des critères de pratique. Ce centre est viable financièrement par le biais des institutions locales. De plus, il revêtirait une dimension éducative importante et outre la performance, permettrait de construire un parcours de vie en concertation avec les acteurs éducatifs que sont l’éducation nationale et les familles. Cette démarche s’inscrit dans le partenariat avec nos différents partenaires institutionnels dont le Conseil Général qui développe de nombreuses innovations en ce sens avec les partenaires associatifs.
Vous avez des projets en high-school, vous semblez les avoir montés tout seul avec votre réseau "nord-américain" ?
Nous revenons à notre histoire d’autonomie. Les récentes expériences de certains jeunes au Canada ont montré le besoin impérieux de proposer à nos jeunes cette filière nord américaine qui ne peut être que bénéfique. Nous avons donc rencontré une association (AFS) dont le cœur d’activité sont les échanges internationaux afin de sécuriser un maximum l’environnement scolaire et familiale pour nos jeunes outre atlantique.
Un fort ancrage local nous a permis de trouver les fonds. C’est plutôt notre réseau local que nous avons sollicité même si, d’autres projets avec notre réseau nord américain se mettront en place prochainement.
En posant sa réclamation, le Flash a indiqué "représenter une masse silencieuse qui n'en pense pas moins" et vouloir démontrer l'opacité du système, n'est pas de la rhétorique polémique? Y a t'il une masse silencieuse et une opacité?
Je pense que de nombreux acteurs du football américain se questionnent sur la relation entre les pôles et les clubs les accueillant. Nous avons depuis de nombreuses années et en concertation avec d’autres clubs de différents niveaux demandé des éclaircissements sur les fonctionnements des pôles et de leurs clubs partenaires. Chaque demande s’est heurtée à un mur, même si, récemment après avoir posé réclamation une réponse nous est parvenue. Cela a eu le mérite d’entamer un échange. Je rappelle que notre fédération est l’émanation des clubs et que la transparence doit y être de mise. Il n’est pas question de polémiquer mais bien d’y voir plus clair sur les possibles conflits d’intérêt afin d’établir une équité indéniable.