Olivier Moret : viser le haut niveau et l'excellence (1/3)Head-Coach de l'Equipe de France Junior

Olivier Moret
Olivier Moret
le 06/06/2012 à 15:54 par Thomas Depaepe

Il y a une dizaine de jours nous avons eu le plaisir de rencontrer Olivier Moret afin de parler de la Coupe du Monde a venir, mais plutôt que de parler strictement de la compétition, nous avons souhaité avoir un regard complet sur le niveau des Juniors français, sur les diffférents championnats (à 9 et à 11), sur la sélection officielle et sur les espoirs dans la compétion.

Mais débutons par un panorama large du niveau Junior.

 

Depuis ton arrivée à la tête de l’équipe Junior, qu’est ce qui a le plus changé ?

Nous avons énormément travaillé sur le facteur physique et la culture de l’entraînement.

C’est une des raisons qui explique les derniers résultats  de l’équipe de France junior lors des compétitions européennes et mondiales. En effet, lorsque j’ai pris mon poste en 2008, on procédait à quelques tests mais ce n’était pas systématique et nous ne même si les tests étaient mauvais, on avait les meilleurs joueurs. Tu étais le « meilleur de ton club », tu te retrouvais en EDF même si tu n’avais aucune culture de l’entrainement. Maintenant il n’en est plus question car tout le monde sait que même si le foot us c’est de la tactique et de la technique, tout le monde sait aussi que sans physique le reste ne sert à rien quand tu dois affronter les meilleurs mondiaux. Je pense vraiment que le facteur physique est prépondérant dans notre sport, donc j’ai fait en sorte que les jeunes prennent conscience qu’il nous fallait beaucoup travailler là-dessus, car nous étions très en retard sur nos concurrents allemands et suédois. Dans l’équipe qui partira à Austin, tous les joueurs seront passés par la batterie de tests planifiés à tous les stages et notamment le Bench Press (entre autre) et tous sont beaucoup mieux préparés physiquement. Nous avons rattrapés notre retard sur les autres nations européennes.

 

On voit en effet, qu’à part sur la ligne offensive, on a des joueurs qui ont des physiques proches de ceux qui évoluent en World Team ou en Team USA.

En effet, s’il nous reste la nécessité de travailler sur la vitesse d’exécution, notre explosivité, pour se rapprocher des meilleurs, à l’inverse grâce à l’accent mis sur le physique on a une équipe qui a comblé une grande partie du « gap » de puissance, de poids et de taille par rapport aux meilleures nations comme les USA. Sans puissance, nous ne pouvons rivaliser avec les « grandes nations » même si notre système offensif basé autour de l’option pose d’autres problèmes tactiques à nos adversaires.

 

Pour réduire le gap physique entre les « bleuets » et les autres, les clubs ont un rôle essentiel via les entrainements et la culture qu’ils inculquent aux joueurs ?

Tout à fait, mais plus que cela, les clubs doivent comprendre que pour la compétitivité de nos sélections nationales il est essentiel que les juniors 2 qui sont prêts physiquement s’entrainent et soient alignés en Sénior. Malheureusement on voit trop souvent des joueurs stagner en terme de niveau parce qu’on leur refuse de s’aligner en Sénior pour l’intérêt du club qui veut des titres juniors ou des victoires… alors qu’à long terme c’est plus rentable de mettre les meilleurs juniors en Elite pour qu’ils deviennent plus fort, plus rapide et plus performant.  Quand je vois qu’en Autriche toute leur sélection évolue en Sénior dans les clubs, cela montre vers ou l’on doit aller car les jeunes doivent jouer plus tôt au plus haut niveau ; en France, les Spartiates, les Kangourous, les Canonniers, Les Centaures l’ont bien compris que c’est totalement positif pour l’équipe et le jouer de faire évoluer en Elite des J2, on voit aussi à Nice qu’un joueur comme Massimo Pignataro est un leader en défense alors que c’est un très jeune joueur.

 

N’y a-t-il pas quand même une différence physique entre Junior 2 et Sénior qui peut être dissuasive pour des joueurs ?

Je n’en suis pas certain. En tout cas s’il y a une différence elle n’est pas si importante que cela au regard des exemples que je citais tout à l’heure ou d’un Geoffrey Malek aux Kangourous (D2). Je regrette un  peu qu’un Michael Doukouré qui a été élu meilleur receveur Junior européen en 2008 ait mis si longtemps à être aligné en Elite car la finalité ce n’est pas les titres nationaux ou l’équipe de France, c’est le haut niveau et offrir la possibilité à ceux qui en ont le désir et les moyens d’aller taper à la porte du très haut niveau, de la NCAA voire même plus haut. Je rappelle quand même qu’en 2009 on a joué le coureur David Wilson qui a été drafté cette saison au 1er tour par les Giants.

 

En parlant d’aller vers le très haut niveau, aujourd’hui la majorité des joueurs vont dans la filière canadienne… mais depuis Alexandre Marquignon on se met à oser penser à la NCAA (Sioux Falls University). Où en est-on ?

La filière canadienne reste de loin celle qui attire le plus de joueurs, mais il faut voir que pour l’instant peu ou pas de joueurs sont sortis des études au Canada avec des perspectives sportives. Déjà il y a le problème sportif que même après un cursus complet en université (ce qui n’est pas toujours le cas) ils sont considérés comme étranger pour la draft CFL… et donc mis en balance avec des joueurs américains ce qui ne leur laisse pas beaucoup de chances ; pour éviter cela il faut commencer en CEGEP de niveau 3 A, puis faire l’université au Canada, mais il faut être bien informé et se rendre compte des implications d’un parcours à l’étranger et du fait que l’on est pas forcément titulaire. En plus, sur l’aspect purement scolaire, il y a le problème de la reconnaissance des diplômes et de leur équivalence en France qui pose soucis… et à mon avis aller faire ses études aux USA est plus pertinent en terme de reconnaissance des diplômes, mais c’est vrai que c’est beaucoup plus difficile de jouer au football car le niveau est très élevé. En résumé il y a de nombreux joueurs qui ont tenté l’expérience que ce soit les CEGEP (équivalent du lycée) ou l’université, mais pour l’instant le bilan est faible et les scouts canadiens sont quelque peu perplexes sur les français ; à mon sens, la fédération devrait être partenaire avec des facs canadiennes afin d’inscrire ces « échanges » dans une perspective professionnelle et sportive, mais aussi de faire office de « garanti » sur le niveau du joueur, sur son implication à l’entrainement… et pour ce faire les Pôles Espoir et France ont tout leur rôle à jouer, comme ce fût d’ailleurs le cas avec Alexandre Marquignon que Robert Tucker a repéré et recruté pour la NCAA alors qu’il était au Pôle d’Amiens.

 

Demain nous publierons la suite de l'entretien qui porte sur la séléctions des bleus pour Austin et qui aborde largement la question des championnats Junior à 9 et à 11.

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