Dans les coulisses : Jason TaylorLe légendaire Defensive End, lors d'une interview émouvante, partage les coulisses de sa carrière
Jason Taylor, le légendaire defensive end des Miami Dolphins avec qui il a passé la majorité des 15 années de sa carrière, a donné une interview à Dan Le Batard du Miami Herald où il nous révèle les coulisses parfois cauchemardesques d’une carrière prolifique durant laquelle il a amassé 139,5 sacksSack
plaquage du QB dernière la ligne de scrimmage (perte de terrain)., retourné 6 fumblesFumble
quand le porteur du ballon laisse échapper celui-ci par maladresse ou suite à un choc. Le ballon est alors à terre mais vivant et c'est la 1ère équipe qui le ramasse qui en prend la possession. Avec les interceptions, le fumble est la seconde façon de rendre le ballon à l'adversaire. Ensemble, ils constituent des Turnovers (pertes de balle). C'est souvent cette stat. qui décide de l'issue de la rencontre. pour un touchdownTouchdown (TD)
c'est l'essai qui vaut 6 points et qui peut être transformé au choix à 1 ou 2 points. Il suffit que le ballon pénètre dans la endzone. (pas besoin d'aplatir) et était nommé meilleur joueur défensif de l’année en 2006. Nous vous proposons la rétranscription de cette entrevue passionnante.
Dernièrement les drames qui ont rythmé la vie de la NFL, le meurtre/suicide de Javon Belcher, le suicide de Junior Seau et même la fracture des cervicales de Kevin Evrett en 2007, ont aujourd’hui fait de l’intégrité des joueurs le problème central de la ligue.
Sous l’impulsion du commissionnaire Roger Goodell, la NFL a grandement changé ces règles, durcissant également les pénalités et les amendes.
Aujourd’hui seulement, les médias mettent en lumière, les crânes brisés, les cerveaux commotionnés, la mort, la dépression, la démence qui envahissent l’esprit du football, et des footballeurs, persuadant certains d’entre eux que mettre fin à leur jour est la seule solution pour stopper ces maux colonisant leur corps. Cependant, il s’agit là seulement de la partie visible de l’iceberg.
Jason Taylor nous amène derrière la scène du grand show qu’est la NFL.
Notre star a joué de nombreux matchs avec un cathéter caché sous son bras. Son mollet a suinté du sang de septembre d’une année à février de la suivante, le forçant alors à se faire poser un drain.
Il s’agit de l’histoire d’un corps meurtri, l’histoire d’un homme poursuivant la gloire, voulant s’élever. Cette quête commence au plus près du sol… avec ses pieds.
Jason avait un déchirement ligamentaire, un déchirement dans chaque pied. Mais il voulait jouer. Il voulait toujours jouer. Alors il alla dans une salle se trouvant à l’écart, au cœur du stade.
« Comme dans un donjon, » décrit-il. « Un néon clignotait. L’atmosphère était moite, une forte odeur de moisissure. Un peu comme la cave de “Z” dans Pulp Fiction. »
Les docteurs lui tendirent une serviette. Pour sa bouche. Afin d’éviter qu’il ne se morde la langue. Mais aussi pour étouffer ses cris.
« C’est la pire douleur jamais ressentie, » dit-il. « De loin. Tous les nerfs se terminent dans les pieds. »
Ce n’était pas à cause de l’affection, c’était le traitement. Une aiguille devait pénétrer dans le pied afin d’administrer le traitement. Cependant, il n’y a pas beaucoup de zones tendres et amicales dans le pied pour une énorme aiguille. La douleur dans le pied est là pour une raison, il s’agit du corps hurlant, au cerveau de lui venir en aide. C’est un avertissement, cette aiguille elle, fait taire les cris et par la même occasion l’avertissement.
« La première injection est ridicule, » explique-t-il. « Ridiculement horrible. Insoutenable. »
La première injection dans le pied, est nécessaire pour endormir la zone… en vue de la seconde piqure qui est pire.
« Tu ne peux pas anesthésier complètement le pied sinon cela devient juste un poids mort, » raconte-t-il. « Tu dois trouver le parfait équilibre d’antalgique. J’hurlai et je pleurai tellement la douleur était forte. J’en ai des sueurs froides de me remémorer ces moments-là. »
Comment a-t-il fait pour continuer à jouer ?
« Mes performances n’étaient pas bonnes, » dit-il. « Mais je jouais quand même mieux que ce que mon remplaçant aurait pu faire. »
Il n’a jamais remis en question ces injections ou encore la douleur subie, il n’a jamais douté non plus du donjon ou encore des docteurs. Les états d’âme sont pour d’autres gens, pour les faibles.
Une seule fois, le défenseur a douté de ce qu’il devait surpasser pour être un footballeur pro et jouer, lorsqu’il pleurait, étendu sur le sol du parking devant le cabinet de son médecin. L’aiguille qui avait traversé son épine dorsale était la source de cette incertitude sur le prix à payer pour être un joueur de haut niveau. Cependant, ces hésitations étaient aussi fugaces que l’apaisement provoqué par les injections épidurales.
Durant la saison 2006, il n’a quasiment jamais participé aux entrainements, freiné par une hernie discale, qui l’obligeait à s’administrer les molécules utilisées pour traiter les douleurs des femmes enceintes lors des accouchements. Cela uniquement pour être sur le terrain le dimanche.
Taylor nécessitait l’aide de sa femme pour descendre les marches après de telles injections dans la colonne, mais ce n’était pas le plus mauvais effet. Un jour, son dos se bloqua lorsqu’il tenta de s’asseoir dans la voiture, le faisant s’écrouler sur le sol.
« Je convulsais sur le sol, » raconte-t-il. « Ma femme tentait de me relever sans succès. J’étais en pleurs. »
De l’aide arriva pour l’aider à remonter dans le cabinet médical… pour une nouvelle piqure dans une différente zone de sa colonne.
Paradoxalement cette saison-là il reçut le titre honorifique de meilleur joueur défensif de l’année. Son coach à l’époque, Nick Saban, explique qu’il a pu remporter ce titre grâce au peu d’entrainement auquel il a pris part, lui permettant de garder sa fraîcheur physique et son corps à l’abri des ravages des entrainements quotidien.
« Durant une période de presque deux ans, je ne pouvais même pas mettre mes enfants au lit. Je ne pouvais pas me baisser. Encore moins avec leur poids dans les bras. »
Il n’expose pas son histoire pour se vanter, encore moins pour se plaindre. Il désire seulement raconter. Il est conscient qu’il a été chanceux d’accomplir ce qu’il a accompli. Il répond seulement factuellement aux questions concernant le monde dans lequel il a évolué et travaillé.
Ce n’est rien de plus qu’un jeu barbare, ou il faut essayer de prouver que vous êtes plus un homme que l’homme à côté de vous sur le terrain ou dans le vestiaire, repoussant toujours sa résistance face à la douleur.
A-t-il mentit aux médecins ? Oui.
A-t-il franchit la ligne et reçut des injections d’élixir magique, le Toradol (anti-inflammatoire), avant les rencontres, apaisant et inhibant les douleurs pour trois heures, et cela malgré de nombreux effets secondaires (maux de tête, nausées, douleurs dans la poitrine, sang dans les selles…) ? Oui.
Pense-t-il que son attitude était saine et réfléchie ? Non.
S’est-il soucié que son attitude était démente et irréfléchie ? Non.
Lors d’un match à Washington, un lineman plongea dans les jambes de Taylor. Rien d’inhabituel. Banal. Son mollet était endolori et contus, mais le Toradol d’avant match, les antidouleurs d’après match ainsi les somnifères prescrits masquaient la douleur. Tout allait bien jusqu’à ce qu’il ne puisse plus dormir et que les effets des médicaments aient disparu. Le seul moyen de stopper la souffrance était de rester debout. Il s’endormit debout, appuyé contre un mur, mais dès que les muscles de sa jambe se relaxèrent dû au sommeil, la douleur se réveilla et Taylor également. Il appela alors sont préparateur physique pour savoir s’il lui était possible de prendre une autre pilule de Vicodin (dérivé de la morphine), « certainement pas » lui répondit ce dernier.
L’entraineur se précipita chez le Dolphins, Taylor pensait qu’il dramatisait. Mais le coach l’emmena directement à l’hôpital pour effectuer des tests. La pression sanguine de Taylor était tellement haute que le médecin pensa que les résultats étaient erronés, et ordonna de nouvelles vérifications. Les résultats furent les mêmes. Le médecin exigea une intervention chirurgicale immédiate. Le DE répondit qu’il en était hors de question, il voulait d’abord appeler sa femme et son chirurgien pour un second avis. Son médecin recommanda lui aussi l’opération et rapidement. Taylor se résigna, lui rétorquant qu’il rejoindrait son chirurgien le lendemain matin. Son médecin expliqua que si il attendait le lendemain, dès son arrivée il devrait alors amputer sa jambe. Taylor pensait que le médecin plaisantait. Ce n’était pas le cas.
Le diagnostic : Syndrome des loges. Il s’agit d’une hémorragie interne au muscle causant des dommages nerveux. Deux heures d’attente de plus et le défenseur auraient eu une jambe de moins.
Sa réaction ?
« J’étais furieux, car j’allais devoir manquer trois semaines, » dit-il, « je jouais à un niveau exceptionnel. »
Il avait 19 à 22 cm de nerfs endommagés.
« Nous faisons les choix que nous faisons, » explique-t-il. « Les joueurs jouent. C’est ce que nous sommes. Nous pensons que nous pouvons toujours tout surmonter. »
Tout est fait pour qu’un joueur qui n’est pas totalement remis refoule le terrain, le joueur blessé subit la pression des coachs, de ses coéquipiers… C’est aussi le désir du joueur, pour ne pas être remplacé, ne pas perdre son job. Le joueur est partie intégrante d’une culture qui ridiculise, moque et éradique les faibles, où les médecins ne se préoccupent pas nécessairement de l’intégrité des joueurs, mais plutôt de les maintenir suffisamment en bonne santé pour qu’ils puissent jouer le dimanche.
Les docteurs établissent les diagnostics et révèlent les conséquences aux joueurs, c’est ensuite au footballeur de faire le choix, s’asseoir sur le banc et se soigner où bien s’injecter un antidouleur pour continuer à être sur le terrain. Le choix est toujours de jouer.
Vous ne savez jamais si toutes ces injections, et Jason Taylor en a connu de nombreuses, produisent plus de douleurs que d’apaisement.
Le Toradol a été scientifiquement lié aux inflammations de la voûte plantaire (les même affectant Taylor) donc il devait prendre un antidouleur diffèrent pour soigner cette pathologie… qui créait une nouvelle souffrance… qui elle nécessitait un autre antalgique.
C’est certainement ce cercle vicieux qui s’est déclenché après son opération du mollet, lorsqu’il a développé un staphylocoque. L’obligeant alors a porté un cathéter sous son aisselle pour acheminer des antibiotiques jusqu’au cœur. Tous les jours, comme une voiture faisant le plein, il devait s’injecter ce traitement pendant 30min. Durant pour ne pas que ses adversaires découvrent sa faiblesse, afin de traiter l’infection.
Taylor a porté et joué ce cathéter durant des semaines, malgré les médecins le prévenant que c’était une mauvaise idée. Il le cachait à l’aide de scotch pour ne pas que ses adversaires découvrent sa faiblesse. Les porteurs de ce genre d’équipement sont conseillés d’éviter toute activité physique. Mais Taylor ignora simplement l’avis des praticiens.
Le légendaire Dolphin déteste les joueurs qui campent dans la salle de rééducation, il les définit comme tendres et faibles.
Une citation de son mentor, le légendaire quarterbackQuarterback
c'est le stratège de l'équipe. Il décide des tactiques avec ses coachs. Il est chargé de transmettre la balle à ses coureurs et de distiller les passes à ses receveurs. de Miami, Dan Marino, est écrite sur les murs de cette même salle, et corrobore la pensée de Taylor. « Lorsque vous êtes en rééducation, vous ne faites pas partie de l’équipe. »
Taylor est aussi très fier de savoir qu’une de ces citations côtoie celle de Marino sur ces murs : « Soit un joueur, pas un patient. »
Ces phrases sont révélatrices d’atmosphères particulières qui flotte dans le football, même dans le seul sanctuaire du football réservé à la récupération, et aux soins, les joueurs son encerclés par des voix les pressant de « Dégagez de là ! »
« Est-ce que je recommencerai ? Sans aucun doute, » termine-t-il. « Si pendant 15 ans je devais devait dormir debout, je le ferai. »